Tiques et maladie de Lyme

Les tiques sont des acariens hématophages que l’on retrouve principalement en forêt au printemps et en automne. En Europe, elles représentent les plus importants vecteurs de maladies infectieuses pour l’Homme et les animaux. En France, la principale maladie transmise à l’Homme est la maladie de Lyme.

Les tiques se nourrissent du sang des animaux ou des humains sur lesquels elles se fixent. Elles peuvent alors s’infecter en prélevant des agents pathogènes sur des hôtes infectés. Elles vont ensuite infecter les hôtes sur lesquels elles vont de nouveau prendre un repas de sang : les tiques sont donc des « vecteurs » de maladies. La transmission se fait principalement par le biais de leur salive.

Parmi les agents pathogènes transmis par les tiques à l’Homme, deux sont bien connus des médecins : le virus de l’encéphalite à tique, très fréquent en Europe du Nord-est (et qui provoque quelques cas par an en France). Le deuxième groupe est celui de bactéries pathogènes appartenant au complexe Borrelia burgdorferi qui provoque la maladie de Lyme, ou borréliose de Lyme. Ces bactéries sont vectorisées principalement par I. ricinus en France. Quelques jours après la morsure de tique infectée par Borrelia, un érythème migrant (halo rouge caractéristique sur la peau) peut apparaître autour du point de morsure et s’étendre. À ce stade, un traitement antibiotique permet d’enrayer la maladie. en l’absence de traitement, la maladie peut provoquer des atteintes cutanées, musculaires, neurologiques et articulaires pouvant être très invalidantes. D’où l’importance d’un diagnostic rapide après une morsure par des tiques. La maladie de Lyme n’est pas une maladie à déclaration obligatoire mais selon Santé Publique France (SPF), le nombre de nouveaux cas serait estimé à 30 000 par an mais avec une grande disparité régionale, la région Bourgogne-Franche-Comté étant particulièrement touchée. S’il convient d’être vigilant, il ne faut pas céder à la panique puisque seules 20 % des tiques seraient porteuses des bactéries responsables de la maladie de Lyme selon Muriel Vayssier-Taussat, chef du département scientifique Santé animale de l’INRA et coordinatrice du projet oH Ticks.

Le développement d’un vaccin contre la maladie de Lyme, devrait prochainement connaître un grand coup d’accélérateur. La société lyonnaise spécialisée en biotechnologie Valneva SE ayant annoncé sur son compte twitter, le 24 juillet dernier, que son projet venait de recevoir le statut prioritaire « fast track », délivré par l’agence américaine en charge de la sécurité des aliments et des médicaments (FDA). La mise à disposition du vaccin pour le grand public n’est cependant pas pour demain. Franck Grimaux, le directeur général de la société lyonnaise, envisage un lancement officiel pour la fin de l’année 2021.

La morsure d’une tique est indolore car elle injecte des substances anesthésiantes dans la peau. Elle peut rester accrochée à son hôte et se gorger de sang pendant plusieurs jours. La tique Ixodes n’a ni yeux ni tête mais est pourvue d’un rostre qui pénètre la peau comme un harpon. en même temps que les substances anesthésiantes, la tique sécrète une sorte de colle qui l’aide à maintenir le dard à l’intérieur de la peau. Voilà pourquoi il ne faut pas tirer dessus pour l’enlever, car on risquerait d’arracher, ainsi, les pièces buccales du reste du corps de l’acarien. Il faut tourner pour dévisser la tique (avec un tire-tiques ou avec ses doigts) et désinfecter le site de piqûre après avoir enlevé le parasite.

La faune sauvage, en particulier les rongeurs et les oiseaux, mais aussi les cervidés jouent un rôle important dans le cycle des tiques et des maladies qu’elles véhiculent parce qu’ils sont utilisés par elles pour leur repas sanguin. Ainsi, un chevreuil peut être infesté par plusieurs centaines de tiques.

Le tamia, un nouveau réservoir de bactéries pathogènes

Les rongeurs et les oiseaux sont connus pour être des réservoirs de différentes espèces de Borrelia pathogènes pour l’homme. En collaboration avec le muséum National d’Histoire Naturel, les chercheurs de l’INRA ont démontré que le tamia de Sibérie (Tamias sibiricus barberi), présent dans certaines forêts, était un bon réservoir potentiel. Cet écureuil, vendu dans les animaleries depuis les années 1960, a été relâché par les propriétaires lassés de sa compagnie. Les travaux des chercheurs indiquent qu’il est infesté par plus de tiques que le campagnol. il est également infecté par une diversité de Borrelia plus importante. Il devient donc un réservoir important dans les endroits où il est abondant. La solution envisagée est d’arrêter la vente de cet écureuil ce qui mettra fin par la même occasion à son abandon par des acheteurs lassés.

Les renards contre la maladie de Lyme

Dans un article publié dans la revue Proceedings of the Royal Society, des chercheurs néerlandais démontrent que plus les renards sont nombreux dans les forêts, moins les tiques sont vectrices de la bactérie responsable de la maladie de Lyme ; et inversement. La diminution n’est pas négligeable puisque dans les zones les plus peuplées en renards, les tiques infectées récoltées sur des rongeurs peuvent être jusqu’à 20 fois moins nombreuses.

Pour arriver au stade adulte, les tiques doivent procéder à trois repas de sang. Elles évoluent ainsi du stade de larve à celui de nymphe, puis à la forme adulte. En forêt, les larves, en principe dépourvues de toute infection, s’accrochent au premier animal venu qui, dans ces écosystèmes, sont souvent de petits mammifères : campagnols, souris, ou autres rongeurs.

Or, ces espèces sont souvent porteuses de nombreux agents pathogènes, dont la Borrelia. Après la piqûre, les tiques sont infectées, et peuvent à leur tour transmettre la bactérie à d’autres animaux, et en particulier à l’homme.

En présence de renards, les populations de rongeurs sont moins nombreuses, et les tiques se rabattent sur des espèces moins – ou pas du tout – porteuses de la bactérie. Ainsi, mécaniquement, le taux de tiques infectées baisse.

La réintroduction du renard mais aussi de la fouine pourrait donc être un moyen de lutter contre la maladie de Lyme, en réduisant le nombre de tiques infectées par la Borrelia.

Les sciences participatives pour comprendre et prévenir les maladies transmises par les tiques

Les sciences participatives associent citoyens et chercheurs et permettent notamment d’accélérer l’acquisition des connaissances. Dans le cadre du projet Citicks, plusieurs équipes de scientifiques menées par l’Inra font appel aux volontaires qui souhaitent participer à l’effort de recherche dans la lutte contre les tiques et les maladies qu’elles transmettent.

Le projet Citicks vise à rassembler une masse importante d’informations sur les tiques à l’échelle du territoire. On en sait vraiment encore trop peu sur ces parasites et les agents infectieux qu’ils transportent. Les participants au projet vont jouer un rôle décisif dans l’avancée des connaissances scientifiques en signalant leurs piqûres et en échantillonnant les tiques. Peut-on se faire piquer en hiver et en été alors qu’il est admis que les périodes propices sont le printemps et l’automne ? Y a-t-il des heures où les tiques sont plus actives et piquent davantage ? Est-ce qu’on se fait plutôt piquer dans les forêts, dans les parcs urbains ou dans nos jardins ? Quels sont les agents pathogènes les plus présents chez les tiques ? Dans quelle région ?… Au final, il s’agit pour chacun de mieux se protéger des risques de contamination par les tiques.

Une application Smartphone « Vigi-Tique » pour collecter des données

Avec le laboratoire Ephytia, les scientifiques développent un site web et une application smartphone appelée Vigi-Tiques qui permettra aux personnes volontaires de prendre part à une collecte d’informations sans précédent.

Il suffira que ces personnes indiquent où et quand elles ou leur animal domestique ont été piqués par une tique. Les informations seront intégrées à une base de données et la cartographie des piqûres pourra être consultée. Les chercheurs français espèrent avoir le même succès que leurs collègues suisses qui, en 18 mois, ont obtenu près de 7 000 signalements de piqûres de tiques et 10 000 téléchargements de l’application.

Laurent HOUY-CHATEAU
31/08/2017

Plus d’infos

Télécharger l’application Signalement-Tique :

https://play.google.com/store/apps/details?id=com.inra.VigiTic

https://itunes.apple.com/fr/app/signalement-tique/id1257654095?mt=8

Dépliant sur la prévention de la maladie de Lyme « Les conseils de Prudence » à destination des enfants : http://inpes.santepubliquefrance.fr/CFESBases/catalogue/pdf/1797.pdf

Dépliant « Maladie de Lyme » sur les risques induits par les piqûres des tiques et les gestes de prévention : http://inpes.santepubliquefrance.fr/CFESBases/catalogue/detaildoc.asp?numfiche=1712#